Le Wendigo
Destiné à renforcer le tabou qui entoure la pratique du cannibalisme, le mythe du Wendigo imagine les maléfices qui menacent ceux qui osent consommer de la chair humaine. Le Wendigo - qui donne les Wendigowak au pluriel - est en effet une créature maléfique, de nature anthropophage et dotée d'un appétit insatiable, que l'on associe aux péchés de gourmandise et de cupidité. On le retrouve dans tout le folklore d'Amérique du Nord et particulièrement au sein des croyances des tribus Ojibwe, Micmac, Cri, Innu et Naskapi, de culture algonquienne. Solidement ancré dans les légendes amérindiennes, il posséderait des liens avec le Chupa Cabra d'Amérique du Sud et aurait été, pour les natifs, une manière de caractériser l'homme blanc et sa soif de l'or.
Symbole du froid et de la famine hivernale, il hante les bois à la recherche d'humains égarés pour satisfaire sa faim douloureuse. Mais rien ne peut combler le vide qu'il possède au creux de l'estomac, et bien qu'il dévore sans cesse de nouvelles proies, son corps ne peut que maigrir et s'affaiblir. Néanmoins, quelques variantes du mythe proposent que le Wendigo grandisse à chaque repas, sans s'épaissir pour autant. Certaines tribus le décrivent alors comme si grand que sa tête dépasse la cime des arbres lorsqu'il se tient droit. D'autres parlent d'un être fait de glace dont la présence est annoncée par de soudains vents violents. Un cri déchirant et une odeur si nauséabonde qu'elle fait fuir le gibier sont également parfois décrits. Un chercheur et enseignant Ojibwa du nom de Basil Johnston le décrit de la façon suivante : « Le Wendigo était émacié à un point extrême, sa peau desséchée tirée et tendue sur ses os. Avec ses os poussant contre sa peau, elle même de la couleur des cendres grises de la mort, et ses yeux repoussés au plus profond de leurs orbites, le Wendigo ressemblait à un squelette récemment déterré de sa tombe. Ses lèvres, étaient en lambeaux […] souillé de sang et de souffrance et de suppurations de la chair, le Wendigo dégageait une odeur étrange et inquiétante de dégradation et de décomposition, de mort et de corruption. »
Il existe plusieurs manières de devenir un Wendigo, car comme je le supposais plus haut, on ne naît pas tel. En hiver, alors que les conditions climatiques deviennent particulièrement rudes et que la famine s'installe, certains humains peuvent être tentés par le cannibalisme : erreur, car celui qui s'y adonne se verra condamné à mourir éternellement de faim sous la forme d'un Wendigo. Il est également possible d'en devenir un en étant possédé par un esprit lors d'une balade en forêt ou suite à une malédiction. La gourmandise et la cupidité peuvent elles aussi déclencher une transformation. Le Wendigo, à l'instar des lycans ou loup-garous, peut être tué à l'aide d'une balle en argent. Il est également possible de s'en débarrasser par le feu, puisque comme toute créature de l'hiver qui se respecte, il n'apprécie pas la chaleur.
L'importance de ce mythe dans la culture amérindienne est à mesurer. Non seulement il a donné lieu à plusieurs pratiques rituelles et a permis de lutter contre le cannibalisme, mais il a été à la source d'une pathologie mentale que certains psychologues désignent comme la Psychose du Wendigo. Inconnu chez les autres peuples, ce trouble déclenche une violence inhabituelle et un désir insatiable de chair humaine chez des hommes et des femmes marqués par la croyance au Wendigo et se croyant possédés. Bien souvent, une visite chez un sorcier ou un médecin suffit à calmer le malade, mais parfois, il passe à l'acte. Mais de nombreux spécialistes de la question estiment que cette psychose n'a jamais existé et qu'elle a seulement servi à expliquer des pulsions cannibales, voire à condamner des innocents ayant montré un peu plus de violence qu'à l'accoutumée, lors de chasses aux sorcières.
/Spawy
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