Folklore Japonais
La Futakuchi-onna
Or donc, parlons un peu de la Futakuchi-onna (à prononcer « foutakoutchi-onna » en insistant sur les n). La Futakuchi-onna est un yokai féminin qui apparaît à cause de l’avarice. Je vous raconte : il était une fois un homme très avare. Il était un tel grippe-sou qu’il refusait de lâcher le moindre denier pour ne serait-ce qu’entretenir une famille. Aussi était-il seul, ne trouvant que des femmes trop coûteuses à marier. Un jour, une femme d’une beauté à se taper le cul par terre se présenta à lui. D’abord méfiant (et oui, une belle femme coûte cher à entretenir), il se ravisa très vite constatant qu’elle mangeait très, très, TRES peu, comme elle le lui avait annoncé. Occasion en or, l’avare se maria avec la femme. Les jours passèrent, sa femme resta d’une beauté et d’une contenance parfaites, la meilleur des femmes pour pas un rond. Au bout d’un certain temps pourtant, le mari se rendit compte que les stocks de nourriture diminuaient plus qu’ils ne consommaient lui et sa femme (toujours rassasiée avec une bouchée). Ce n'étaient pas des voleurs, ni des nuisibles, mais qu’était-ce alors ? Le mari devint fou à cause de ce mystère ! C’est là qu’il commença à soupçonner tout le monde, paranoïaque qu’il était devenu. Et un jour, alors qu’il espionnait sa femme, il eut la réponse. Et mon dieu quelle réponse ! Il voyait les cheveux de sa femme bouger par une sorte de sorcellerie, attrapant de la nourriture pour se diriger ensuite vers l’arrière du crâne de sa femme et nourrir une énorme bouche aux grandes lèvres charnues et pleine de dents. Sa femme était un yokai, une Futakuchi-onna.
La Futakuchi-onna est donc une femme qui présente un joli minois tout en cachant une bouche monstrueuse sous ses cheveux. Comme le Pokémon Mysdibule.
Si l’avarice est toujours le moteur de l’apparition d’une Futakuchi-onna, cette femme maudite n’arrive pas forcément en l’état comme dans cette histoire. Il se peut que la deuxième bouche « pousse » sur la tête d’une femme ordinaire qui mange peu. Il est aussi dit qu’en cas de remariage, si la femme délaisse son enfant adopté (belle-fille ou beau-fils) au profit de celui qu’elle a mis au monde et que ce premier décède, alors l’esprit de l’enfant adopté (qui est mort donc) peut venir hanter sa belle-mère en la transformant en ce yokai en guise de punition pour l’avarice dont elle eut fait preuve à son égard. Pourquoi punition ? Simplement parce que cette deuxième bouche réclame de la nourriture et peut gronder la femme s’il elle n’a pas satisfaction. Elle peut aussi crier et faire souffrir la femme hôte, et le seul moyen de calmer ce mal est de nourrir la bouche. Bouche qui mange comme quatre, bien évidemment. Que ce soit dans un cas ou dans un autre, la Futakuchi-onna est une punition de l’avarice (celle du mari ou de la femme) quand elle devient ridiculement importante.
Voilà, c’est tout pour moi pour l’heure. Si vous aimez les yokai, ne vous en faites pas, j’en ai encore sous la manche et je ne suis pas avare sur ce sujet. Sur ce, à bientôt et méfiez-vous des femmes low-cost.
/Le Prof
La Yuki-Onna
« -Bondour et bienvenue visiteur-san.
-Mais que fais-tu ?
-Ben je commence ton article Prof ! J’ai bien le droit nan ?
-Tu sais que c’est un peu raciste de faire l’accent japonais ? Je ne veux pas de cela chez moi.
-Mais…
-Nope. Tu fais silence misérable ! »
Bien le bonjour, mes petits nems. Aujourd’hui, nous replongeons dans-
« -Parce que ‘‘mes petits nems’’ c’est pas raciste peut-être ?
*Bruit de baffe*
-Je vais vraiment te faire du mal si tu continues. Tu sais ça ? »
Je disais quoi déjà… Ah oui ! Aujourd’hui, nous replongeons dans le monde merveilleux des yokai ! Tout en faisant encore le lien avec mes premières amours que sont les pokémons.
Nous allons parler de la Yuki-onna, littéralement la femme-neige. Je ne vous tiens pas en haleine, le pokémon qui lui est apparenté est Momartik. Donc, la Yuki-onna est une femme, ou du moins le spectre d’une femme ayant péri dans une tempête de neige. Elle est décrite comme étant d’une pâleur aussi extrême que sa beauté, portant un kimono blanc et possédant un regard effrayant. Elle semble glisser sur le sol sans laisser quelconque trace de pas. Elle apparaît aux hommes qui sont pris dans les tempêtes de neiges. Pour tout dire, elle leur apparaît pour les perdre en montagne après avoir affirmé pouvoir les en sortir, et ils meurent de froid. Ou encore, elle leur offre un baiser glacé qui les laisse littéralement de glace. Mais cet esprit n’est pas mauvais par nature. Si elle fait du mal, c’est bien malgré elle. Elle est sincère quand elle propose de raccompagner les voyageurs égarés. Elle sait sa condition d’âme damnée et ne cherche qu’à ne pas faire connaître le même sort aux autres (c’est-à-dire de mourir de froid dans une tempête de neige). De même, ses baisers sont la manifestation de sa solitude. Enfin, il y en a quand même qui sont de vraies s*lopes.
Maintenant, laissez-moi vous conter une histoire sur la Yuki-onna. Il était un vieux bûcheron et son très jeune apprenti qui furent surpris par une tempête de neige alors qu’ils travaillaient en montagne. Ils trouvèrent rapidement refuge dans un refuge, firent du feu et passèrent le temps avant d’aller se coucher. En pleine nuit, le jeune homme se réveilla à cause de l’extinction du brasier. Et alors qu’il s’apprêtait à se lever pour le rallumer, il fut pris de stupeur devant la vue d’une femme au teint pâle vêtue d’un kimono blanc. Cette dernière se pencha sur le vieux bûcheron et l’embrassa. Le vieillard sembla devenir bleu de froid. La femme s’avança alors vers le jeune et fut prise de pitié pour son jeune âge. Elle lui dit qu’elle le laisserait en vie s’il ne révélait jamais à qui que ce soit ce qui venait de se passer. Le garçon n’eut pas le temps de dire mot qu’elle était déjà partie. Il se rendormit sans plus penser au feu. Au lever, la tempête s’était tue et l’apprenti ne pouvait plus dire si les événements de la nuit étaient réels ou un songe. Néanmoins, il se rendit compte que son maître était mort de froid. Bien des années plus tard, il s’était marié à une superbe femme et avait même été comblé par la naissance d’enfants. Toujours il se souvenait de cet étrange rêve et jamais il n’en avait parlé à quiconque. Mais un jour, il profita d’un moment d’intimité avec sa femme aimante pour lui conter ce songe absurde. A ses mots, sa femme se mit en colère et prit un air effrayant. En effet, sa femme était la Yuki-onna qui s’était donnée à lui puisqu’il avait tenu sa promesse de ne jamais parler d’elle. Elle l’épargna de nouveau, non pas par pitié pour lui mais pour leurs enfants. Ainsi elle lui renouvela sa menace de mort si, en plus de reparler de la nuit de tempête, il venait à mal traiter leurs enfants.
C’est beau non ? Moi je trouve que oui. Je m’en vais alors vous laisser sur cet instant de poésie. A bientôt et méfiez-vous des beautés froides !
/Le Prof
La Yama-Uba
Bien le bonjour, chers amis. Les cours ont repris et c’est un peu le bazar. Revenons donc avec un sujet simple. Aujourd’hui nous repartons vers le Japon et ses yokai.
La Yama-Uba (ou Yamamba ou Yamanba) est donc un yokai du folklore nippon qui ressemble à une vieille femme très, très laide. Elle a les cheveux blancs, une peau plutôt sombre pour ne pas dire noire, un kimono rouge (en lambeaux) et une bouche énorme. Elle habite dans une hutte de montagne. Oui, vous me direz qu’il y a beaucoup de yokai en montagne, mais sachant que tout le milieu du Japon est recouvert par une forêt sur des montagnes et que la forêt est sacrée pour eux (un lieu très spirituel où résident nombre d’esprits), on comprendra que les monstres habitent ce lieu. Bref. La Yama-Uba peut se transformer soit en femme ultra sexy, soit en petite mamie gâteau toute gentille. Pourquoi ? Mais pour attirer les humains (plus souvent des hommes) et les dévorer bien évidemment !
Voilà, vous savez tous ce qu’il fau-
« -Tu ne vas pas écrire que ça ?
-Bah tu veux que j’invente des pouvoirs et des histoires sur la Yama-Uba ?
-Non, mais dis voir Prof, tu as déjà entendu parler de la polémique sur Lippoutou ?
-Oh… Je vois de quoi tu veux parler. Pour une fois, tu m’es bien utile ! »
Quand vous entendez le nom de Lippoutou (c’est un pokémon, pour celui qui ne suit pas au fond de la classe) il se peut que vous ayez deux réactions. Soit vous pouffez parce qu’elle est ridicule, soit vous criez au scandale. Les plus jeunes ne le savent sans doute pas mais avant le violet, Lippoutou était noire. On a crié au racisme et tout plein d’absurdités comme ça. Quoi ? Si moi je suis raciste ? Pas du tout, mais j’estime que de mettre le racisme sur le tapis alors que ce n’est pas justifié est stupide. En effet, les hérauts autoproclamés défenseurs de nos mœurs ont vu en ce pokémon une grosse noire avec de grosses lèvres, mais le problème, c’est qu’ils l’ont analysé avec le prisme de la culture occidentale. Le fait que ce soit une créature japonaise inspirée par le folklore japonais n’a jamais traversé l’esprit de ces pédants étatsuniens ou européens. Oui, Lippoutou est un pokémon inspiré de la Yama-Uba. Je vous laisse faire les rapprochements.
Bon, maintenant j’en ai fini. Pardonnez la petitesse de cet article et aussi la moitié polémique. Je vous laisse donc sortir avent la sonnerie en vous souhaitant un bon weekend. Et n’oubliez pas de faire attentions aux mamies gâteau toutes gentilles !
/Le Prof
Les Kitsune
Le terme kitsune est souvent traduit par "esprit renard". Et en effet les kitsune sont des renards intelligents et dotés de pouvoirs qui, après cent longues années de vie, apprennent à prendre forme humaine. Physiquement, ils sont connus pour posséder un nombre de queues allant en augmentant au fil des ans. Ce qui implique qu'un grand nombre de queues indique un renard plus vieux et plus puissant. Lorsqu'un kitsune gagne sa neuvième et dernière queue, sa fourrure devient blanche ou dorée. Ce renard à neuf queues, appelé kyūbi no kitsune (qui pense à Naruto ?), sera doté d'une sagesse infinie.
Bien que souvent décrits comme trompeurs, les kitsune ne sont pas tous malveillants ! Les zenko, littéralement les "bons renards", sont des renards célestes bienveillants associés au dieu shintoïste Inari, divinité du riz, dont ils sont les messagers. En revanche, les yako, littéralement les "renards des champs", tendent à être espiègles. Les traditions locales ajoutent parfois les ninko, esprits renards invisibles que les êtres humains ne peuvent percevoir qu'une fois possédés par eux.
En effet, les kitsune peuvent soit se faire passer pour des hommes, soit posséder un corps de jeune femme. Le prérequis commun pour la transformation en être humain est que le renard doit placer sur sa tête un roseau, une large feuille ou un crâne. Il peut prendre l'apparence d'une belle femme ou d'un vieil homme, quelques soient son âge et son sexe véritables. Les renards restent particulièrement connus pour se faire passer pour des femmes au visage étroit et aux yeux rapprochés, portant des sourcils minces et des pommettes hautes. La croyance commune dans le Japon médiéval était que n'importe quelle femme présentant ces traits et rencontrée seule au crépuscule pouvait être un renard. Dans certaines histoires, les kitsune ont des difficultés à cacher leur queue quand ils prennent forme humaine, particulièrement s'ils sont ivres ou rencontrent un chien, créature qui les effraie.
Un kitsunetsuki, soit une personne habitée, est toujours une jeune femme. Le renard entre en elle en passant sous ses ongles ou à travers sa poitrine. Le visage de la victime peut alors se parer des traits que j'ai précédemment cités. La tradition japonaise retient que la possession peut permettre aux femmes illettrées de gagner la capacité de lire. Elles apprennent également à parler et à écrire dans des langues qu'elles ignoraient. Elles ne mangent plus que ce que les renards aiment, comme du tofu, et en grande quantité. Sur certaines parties du corps des possédées, une boule mobile qui semble avoir une vie propre apparaît. Il s'agit d'une perle que le renard porte dans sa gueule lorsqu'il demeure sous forme animale. Elle serait l'âme du kitsune, ou la source de ses pouvoirs.
La possession par un kitsune est restée un diagnostique ordinaire pour les maladies mentales jusqu'au XXième siècle. Un exorcisme, souvent pratiqué dans un sanctuaire d'Inari, était même recommandé.
/Spawy
Les Kappa
Vous les connaissez peut-être grâce aux univers du manga et de l'anime, qui les présentent parfois sous des traits amicaux. Les Kappa sont pourtant des êtres maléfiques du folklore japonais à la réputation d'assassins. Peuplant les rivières et les lacs, ils occupent leur temps libre en attirant au fond de l'eau hommes et animaux imprudents. Les mâles y finissent noyés, les femelles violées. Et les Kappa dépouillent toutes ces victimes de leurs âmes en passant par un endroit surprenant : l'anus. Selon la coutume, elle résiderait en effet dans un organe fictif, accessible par cet orifice uniquement. Il s'agit donc de créatures dangereuses desquelles il ne faut pas s'approcher. Certains panneaux de signalisation japonais utilisent d'ailleurs les Kappa pour décourager les enfants de jouer trop près des rives, à l'instar de celui-ci :
S'ils sont malveillants, les Kappa ne sont pas pour autant dénués de politesse, et c'est cette caractéristique qui vous sauvera la vie si vous les rencontrez. Il vous suffira en effet de les saluer pour qu'ils voient leurs forces fondre comme neige au soleil. Les Kappa possèdent sur le sommet du crâne un creux en forme d'assiette qui se remplit d'eau chaque fois qu'ils plongent, et qui est à l'origine de leur vivacité. S'ils se penchent en avant pour vous rendre votre salut, l'eau se déversera donc, les privant de toute énergie - ça me rappelle la blague du belge qui tient un cornet de frites et regarde sa montre.
S'ajoutent à ce singulier creux d'autres caractéristiques bien particulières. Les Kappa ne mesurent guère plus d'une trentaine de centimètres et leur apparence mêle la tortue et l'humain. Ils possèdent une bouche ayant les allures d'un bec et bien évidemment, une carapace, mais également quelques cheveux noirs entourant leur assiette d'eau. Leur peau est de couleur verte, ils marchent à quatre pattes et se nourrissent principalement de concombres. Leur longévité est celle de la tortue, ce qui leur confère une vie d'environ cent belles années, et ils maitrisent parfaitement le langage, ce qui leur permet de converser en japonais avec leurs futurs victimes. Autre caractéristique pour le moins étonnante, leurs bras sont reliés et si vous tirez sur l'un, le Kappa aura mal à l'autre. Précisons également qu'ils possèdent trois anus, au sujet desquels on pourra se poser des questions.
/Spawy
Le Baku
Le Baku est un yokai, c'est-à-dire une créature imaginaire issue de la tradition japonaise. Pourtant, c'est premièrement en Chine qu'il fait son apparition comme protecteur du sommeil. Il n'est introduit au Japon qu'au cours de l'ère Muromachi, entre 1336 et 1573, et n'a alors pas de forme bien précise. Tantôt décrit comme un ours portant une trompe d'éléphant, une queue de boeuf et des pattes de tigre, et tantôt peint comme un éléphant à cornes, à pelage tacheté et à pattes de tigre, le Baku est vraisemblablement inspiré du tapir. Il est une chimère éminemment bénéfique, bien que le titre de dévoreur de rêves puisse au premier abord sembler inquiétant. Le Baku peut en effet être invoqué au milieu d'un cauchemar pour qu'il le dévore et, autant faire d'une pierre deux coups, qu'il annihile le mauvais présage que portait ce songe.
Mais alors, un animal qui se nourrit des rêves et ressemble à un tapir... Cela ne vous dirait-il pas quelque chose ? Le Baku est aujourd'hui une créature très populaire dans la culture japonaise, au point d'être présent dans de nombreux mangas et anime et, notamment, dans la série Pokémon. Soporifik et son évolution Hypnomade sont directement inspirés de ce mythe.
/Spawy
L'Akaname
A la nuit tombée, l'Akaname sort de sa cachette, généralement située dans la salle de bain ou les toilettes d'une maison mal entretenue, et promène sa langue sur chaque infime trace de saleté laissée dans la baignoire. Il répand alors des maladies, ce qui encourage ceux qui le craignent à garder propres leurs faïences. Il serait la personnification de la peur de se laver à la nuit tombée dans une pièce sombre, et donc d'être nu sans véritablement savoir ce qui se trouve dans la pièce. Car, si la plupart des textes traditionnels ne lui donnent que l'envie de déguster les immondices laissées dans la baignoire, d'autres, plus modernes, lui prêtent la tendance à lécher le corps des individus sales qui croisent son chemin. Tombant sur une personne dégoûtante ou en mauvaise santé, il ne pourrait s'empêcher de la lécher de partout, pour se nourrir de chaque petite trace de saleté, se frottant sous ses aisselles, sous ses pieds, et à chaque endroit où la transpiration s'accumule...
Le Ningen
Bonsoir. Ou plutôt bonjour, il est 17h50 à ma montre. Mais j'ai pris pour habitude d'adopter un format adapable à la journée entière, afin de ne discriminer personne. Bonjoir, disais-je donc. Asseyez-vous. Les thalassophobes, vous pouvez vous en aller.
Bravo aux courageux qui sont restés. Aujourd'hui, rien de très horrible, ni de très agressif. Non aujourd'hui, l'heure est au glauque et à l'inquiétant.
Nous parlerons encore d'un cryptide, un japonais cette fois-ci : le Ningen. Ningen ( ニンゲン en japonais) signifie "humain". Il ne doit son nom qu'à la forme grossièrement humanoïde de son corps. Il s'agit d'une créature hypothétique, mi-homme mi-cétacé, qui vivrait dans l'Océan Austral.
En 2007, au large de l'Antarctique, une équipe de marins japonais en mission d'etude zoologique (justement sur les cétacés) clame avoir rencontré une créature de ce type. Depuis, les photos et vidéos ont afflué (floues, naturellement), et selon de nombreux témoins autoproclamés, le gouvernement japonais tenterait de cacher son existence pour des raisons obscures.
Le cas du Ningen n'est cependant pas clair. Peu de gens s'accordent sur le fait de savoir s'il s'agit d'une population d'animaux inconnus ou d'une créature solitaire. Selon les témoins, il s'agit d'un cétacé blanc, ou très pâle, aux formes variables, tantôt doté de jambes, tantôt de bras ou de nageoire caudale, ou bien même de mains humaines gigantesques. Autant vous dire la complexité de l'analyse. Sachez que c'est moitié homme, moitié cachalot.
La créature cependant a créé un émoi populaire suffisant pour (et grâce à internet) quitter les frontières du Japon et devenir un cryptide de plus en plus populaire, et même... Un meme internet. Certains fous irrécupérables l'ont aussi adapté en creepypasta. Il suit évidemment le schéma classique de la légende urbaine. Le Ningen a surtout été vu comme une version moderne du mythe de la sirène, puisqu'il lui présente une apparence assez similaire (en sérieusement plus gros). Beaucoup s'accordent à dire qu'il s'agit évidemment d'un canular, mais plus profondément, ne serions-nous pas en train d'assister à un phénomène particulier?
Réfléchissez aux dernières années, depuis l'arrivée d'internet. Les légendes urbaines se multiplient, certaines deviennent même assez crédibles. Parmi celles-ci, on constate une volonté (peut-être inconsciente cela-dit) de renouveler les anciens mythes et légendes du passé, d'une manière plus moderne. Les vampires en sont un exemple flagrant. Les loup-garous également, ou plus évidemment encore, les dragons. Jetez un œil sur les forums du paranormal ou dans les creepypastas, qui sont des histoires inventées sur internet pour se faire peur (histoires qui ont pour thème, bien souvent, la culture populaire). Peut-être que les sirènes nous manquent, tout simplement.
Messieurs, mesdames, il est 18h 30 à ma montre, et je vous remercie de votre attention. Je ne puis développer d'avantage sans devenir ennuyeux et redondant, et il ne s'agit pas ici d'une thèse. Je vous donne enfin la raison de ce choix de créature. J'aime bien relativiser la grandeur de l'humain, que tout le monde prend pour acquise. Et parmi les choses qui m'intriguent, me terrifient et me fascinent, les monstres marins m'aident beaucoup, beaucoup, à relativiser. Pour cette raison :
/Un Vagabond Immobile
Les Gaki
Dans la cosmologie bouddhiste les êtres humains naissent, meurent et renaissent indéfiniment, enfermés dans un cycle dont ils ne peuvent s'extraire qu'en en prenant conscience et en suivant une ascèse destinée à limiter leur impact sur Terre. Il existe six voies de réincarnation possibles après la mort, qui prennent en compte le karma du défunt, c'est-à-dire l'ensemble de ses actions et des intentions qui les ont dictées. Trois sont vertueuses et comportent autant de souffrance que de bien-être ; ce sont les voies qui mènent aux dieux, aux non-dieux et aux êtres humains. Et trois sont destinées à ceux qui ont pêché par la haine, l'avidité ou l'ignorance, et mènent aux animaux, aux fantômes affamés ou aux enfers. Ces six voies constituent le samsara, symbolisé par la roue de l'existence et dont il n'est possible de sortir qu'en atteignant l'éveil, le nirvana. Cet état peut être accessible lors de la vie ou après la mort mais il constitue un détachement absolu, non une survie de l'âme. D'autres personnes que moi vous parleront bien mieux de cet idéal d'illumination, de délivrance et de paix ultime, aussi intéressons-nous aujourd'hui à l'impureté que nous maîtrisons mieux !
Les Gaki en japonais, Preta en sanskrit, se situent juste avant le plus bas barreau de l'échelle des réincarnations proposée par le bouddhisme. Ils sont ce qui attend les personnes avides, sans cesse poussées par le désir et par le vice, mais peuvent également naître de rituels mal accomplis par les familles des défunts. A l'inverse il est possible de sauver un membre de sa famille qui se serait réinarné en Gaki après sa mort grâce à d'autres rituels adaptés.
*Détail du rouleau des “fantômes affamés”, emaki, 12ème siècle, Trésor national, Tokyo*
La plus ancienne mention des êtres affamés au Japon date du XIIe siècle. Deux rouleaux formant un emaki, c'est-à-dire une histoire illustrée rédigée horizontalement, les présentent errant sur Terre au milieu de scènes de la vie quotidienne. On y voit des êtres décharnés au ventre gonflé et à la peau grise qui tentent de s'accrocher aux vivants pour se nourrir à travers eux. Ces Gaki sont torturés par leurs désirs qu'ils ne peuvent jamais combler. Ils ont une faim insatiable de nourriture, de richesses et de plaisir mais tous les moyens de l'apaiser leur sont enlevés. Suivant les mauvaises actions qui leur ont valu cette pénitence, ils connaissent quelques variantes dans les tortures qui leur sont infligées. La plupart d'entre eux qui ont abusé des plaisirs voient tous les mêts qu'ils approchent se consumer dans les flammes qui jaillissent de leurs bouches. Ceux qui ont volé les biens d'autrui par appât du gain finissent ébouillantés dans de gigantesques marmites, ceux qui ont dévoré de grandes quantités de nourriture sans jamais les partager sont condamnés à sentir des odeurs de cuisine pour que leurs bouches ne se referment que sur du vent. Ceux qui ont vendu du saké frelaté demeurent à proximité d'une rivière qu'ils ne peuvent atteindre et souffrent en permenence de la soif. D'autres ne peuvent se sustenter que de vomi et de déjections.
Bon appétit bien sûr !
/Spawy
Le Tanuki
Bien le bonjour, chers amis ! Aujourd’hui nous allons nous intéresser un peu au folklore nippon avec un Yôkai des plus drôles. Vous vous souvenez du Dahu et du Bonnacon, créatures aussi intéressantes que grotesques ? Eh bien le Tanuki (à lire tanouki) est dans cette même lignée.
Le Tanuki est un monstre très populaire au pays du soleil levant. Il est un animal anthropomorphe dont on a bien de la peine à définir quelle est la base animale, puisqu'il est à mi-chemin entre un blaireau, un raton laveur et un chien. Ne vous inquiétez pas, il ne s’agit pas d’une chimère qui ne ressemblerait à rien mais bien d’un animal réel : le chien viverrin (et on dit vivèrrin, pas viveurrin), et ce chien ne ressemble à rien à la base, ceci expliquant donc cela. Le Tanuki est donc représenté comme un chien viverrin debout, la panse bien large, avec généralement un chapeau de paille et une gourde de saké. Il est une autre particularité du chien viverrin qui se retrouve de façon très exagérée chez le Tanuki : une IMMENSE paire de testiboules (désolé mesdames, il n’y a pas de Tanuki avec de gigantesques lèvres). Et je pense qu’avec cette présentation physique vous aurez compris qu’il ne s’agit guère d’un esprit malin.
En effet, il incarne le bon vivant : gros, souriant, l’alcool toujours à portée de main et pour ce qui est de ses bijoux, je vous laisse vous faire votre idée. Le Tanuki est ainsi un symbole de chance et de prospérité : celui des hommes qui lui ressemble n’est pas censé être un miséreux, un nécessiteux. C’est pourquoi il est tant apprécié au Japon, outre sa figure grotesque qui prête volontiers à l’histoire humoristique. D’ailleurs, il me faut être précis avec vous, car « tanuki » est un raccourci du vrai nom de cette bestiole. En effet, le tanuki est le nom japonais du chien viverrin. Aussi le Tanuki mythologique est le Bake Danuki, qui veut littéralement dire « le tanuki se transformant ».
Venons-en aux pouvoirs du Tanuki. Comme son nom complet le laisse entendre, il a un pouvoir de transformation et peut prendre n’importe quelle forme. Dans certaines traditions, on impose une limite à sa transformation, pas une bien grande ni contraignante puisqu’il lui faut seulement mettre une feuille sur sa tête pour se transformer. Son deuxième pouvoir est de faire gonfler son ventre à loisir, ce qui est bien aise pour lui qui aime tant jouer des percussions. En effet, ce ventre gonflé peut bien lui permettre de rester en l’air une fois propulsé, mais le plus souvent il s’en sert comme d’un tambour, le soir, pour animer des fiestas de folie #Wouh. Mais vous ai-je dit qu’il adorait jouer des percussions ? Non, je ne radote pas déjà, c’est juste pour vous faire comprendre qu’il ne peut pas se limiter à une seule façon de jouer du tamtam. Alors petite devinette (un indice chez vous à la maison) : TOP ! Je suis un organe dont on peut tendre la peau qui s’y trouve en abondance, je suis d’ailleurs protubérant chez le Tanuki ce qui lui donne une allure grotesque, je suis, je suis, je suis ? Vous me dites les bonnes couillasses ? Alors là, je dis oui ! OUI OUI OUI OUI OUI ! Aaaaaah… J’aime ce jeu ! Hum, pardon. Eh bien oui, le Tanuki aime aussi se frapper frénétiquement les boules pour jouer du tambour. Il est d’ailleurs à noter qu’il peut à peu près tout faire avec son baluchon (ce qui est son troisième pouvoir, si l’on peut dire) : planer, se couvrir, pêcher, se protéger de la pluie, s’en servir de bouclier, etc. Bref, c’est un peu l’équivalant plusieurs siècles avant sa création de la boule magique #LaRéfInternet.
Bref, vous l’aurez compris, le Tanuki est un Yôkai rigolo et bon enfant qu’il fait bon avoir de son côté. Je vous laisse donc là pour le moment. A bientôt, bisous.
/Le Prof