Le Panthéon
La création du monde
La Mésopotamie regroupait les civilisations des Assyriens, Akkadiens, Babyloniens et Sumériens, qui s'étaient développées entre les grands fleuves du Tigre et de l'Euphrate. Vers 3200 avant notre ère, la civilisation sumérienne donna naissance à une vaste mythologie qui, enrichie au fil du temps, résista aux changements. Le pouvoir mésopotamien quitta Sumer pour Akkad, puis pour l'Assyrie et enfin pour l'Etat de Babylone, mais les dieux restèrent les mêmes. Avec cependant une notable évolution en ce qui concerne leur apparence. Initialement confondus avec les formes de la nature et de sexe indéterminé, ils prirent lors d'une première modification une allure animale. Et finalement, ils ne se différencièrent plus des hommes que par leur taille, leur force et leur immortalité. Trêve de prologue enfin, attaquons par le moment crucial de la création du monde.
A l'aube des temps n'existaient ni terre ni ciel ; seul l'élément liquide était présent. Apsû et Tiamat, l'eau douce et l'eau salée, régnaient. Puis un jour, les eaux d'Apsû se mêlèrent à celles de Tiamat pour former Mummu, les vagues, ainsi que le couple primordial, Lahmu et Lahamu. Plus tard, un autre enfant, Kingu, allait naître de leur union. Vinrent ensuite Anshar et Kishar, qui ensemble engendrèrent Anu, le premier roi des dieux. Celui-ci enfanta avec son épouse Ki le jeune Ea (que l'on trouve plus fréquemment sous le nom d'Enki), son frère Enlil, destiné à accéder au trône, et sa sœur Ninhursag. Mais les jeunes dieux qui résidaient dans le vaste corps liquide de Tiamat étaient si turbulents qu'ils dérangèrent leur ancêtre Apsû (Ah, ces jeunes ! Les valeurs se perdent !), qui commençait par ailleurs à s'inquiéter de leur pouvoir. Il décida donc de les détruire en s'associant à Mummu. Il confia ses plans à Tiamat, mais celle-ci fut réticente à de telles extrémités. Tiamat avertit Ea/Enki du complot et ce dernier captura Mummu avant de plonger Apsû dans un profond sommeil pour le tuer plus facilement. Tiamat en fut, pour le moins, assez mécontente... Mais l'outrecuidance d'Enki ne s'arrêta pas là, et il s'empara des profondeurs liquides où il s'installa en compagnie de son épouse Damkina. Celle-ci donna naissance à Marduk, le plus grand des dieux, qui adorait jouer avec le vent et créer des tempêtes.
Le temps passa et, encouragée par les autres divinités qui n'avaient pas non plus apprécié le meurtre d'Apsû, Tiamat se prépara à combattre Marduk, le fils de son ennemi. Elle convoqua onze monstres et serpents qu'elle plaça sous le commandement de son fils Kingu, qu'elle avait pris comme nouvel époux (tant qu'à faire). A ce même Kingu elle remit les Tablettes du Destin. Ea/Enki demanda à Marduk de relever le défi. Celui-ci accepta à la condition d'obtenir, en cas de victoire, le titre de chef suprême des dieux. Il fut doté d'armes au pouvoir irrésistible et souleva une tempête qui immobilisa Tiamat. Puis il mit l'armée en fuite et fit prisonnier Kingu, qui finalement, fut exécuté. Enfin et pour terminer les choses en beauté, Marduk divisa le corps de Tiamat. De la partie supérieure, il forma la voûte céleste avec étoiles et planètes ; de la partie inférieure il créa la terre ; et de ses yeux, il fit couler le Tigre et l'Euphrate. La déesse Ki en profita pour créer l'homme en mélangeant le sang de Kingu à de l'argile, sur les conseils d'Enki. Marduk confia ensuite les Tablettes du Destin, qu'il avait récupérées au cours de la bataille, à son oncle Enlil, puis il fut intronisé par l'assemblée des dieux qui érigèrent un sanctuaire en son honneur et donnèrent à celui-ci le nom de Babylone.
"Lorsque Là-haut le ciel n’avait pas encore de nom,
Et qu'Ici-bas la terre n'avait pas de nom,
Seuls, Apsû, le primordial, le géniteur,
Et Tiamat, la génitrice qui les enfantera tous,
Mêlaient en un seul tout leurs eaux :
Ni bancs de roseaux n'y étaient encore agglomérés,
Ni cannaies n'y étaient discernables.
Des dieux nul n'était encore apparu,
Ils n'étaient ni nommés ni dotés de leur destin"
Enuma Elish, le poème de la création de l'univers.
/Spawy
Anu
A la tête du panthéon se trouve Anu, le roi de la dynastie divine des Anunnaki. Les Annunaki sont les divinités majeures qui commandent aux Igigi, divinités mineures qui vivent sur la Terre. Anu est le fils de Anshar et Kishar, les descendants de Lahmu et Lahamu, eux-même issus du couple primordial Apsû et Tiamat. Il est également le père d'Enlil et d'Ea/Enki, ainsi que de la déesse Ninhursag. Il eut de plus, avec son épouse Ki, sept petits démons.
Anu est considéré dans la mythologie mésopotamienne comme le dieu du ciel et de la pluie. Il porte une tiare à cornes et devant son trône sont placés les insignes de la royauté, à savoir un sceptre, un diadème, une couronne à cornes et le bâton de commandement. Il règne sur les dieux, les démons et les esprits, et habite "le ciel d'Anu", un royaume situé dans la partie la plus élevée du ciel. Il ne le quitte jamais et ne descend pas sur Terre. Quand il sort de son immobilité majestueuse, c'est uniquement pour se promener dans une portion de ciel qui lui est exclusivement réservée et qui porte le nom de "route d'Anu". On ne peut donc pas dire qu'il s'agisse d'un roi très dynamique. En revanche, sa principale qualité est celle de justice. Il possède son tribunal et juge tous les criminels. C'est vers lui que se tournent les divinités quand elles se sentent menacées. Par exemple la déesse Ishtar, repoussée par le héros Gilgamesh, alla trouver Anu et lui confia avoir été outragée. Gilgamesh, dont elle s'était éprise, n'avait en effet pas été tendre avec elle. Il lui avait dit en la raillant : "Non, je ne veux pas de toi pour épouse ! Tu n’es qu’un fourneau qui s’éteint dans le froid, une porte qui laisse passer les courants d’air, un palais qui s’écroule sur ses défenseurs, un éléphant qui jette bas ses harnais, un bitume poisseux, une outre percée, un mortier friable, un bélier qui démolit les remparts amis, une chaussure qui blesse le pied." Blessée, Ishtar demanda à Anu de créer un taureau céleste pour lutter contre Gilgamesh et le tuer. Anu, après avoir évalué la situation et fait la morale à Ishtar, qui avait selon lui cherché Gilgamesh, accéda à sa requête. Pour un résultat limité, puisque Gilgamesh transperça le taureau de son glaive.
Anu, en tant que roi, possède une armée constituée d'étoiles qui fait appliquer ses jugements. Mais à force de ne pas se préoccuper de la Terre, il fut progressivement supplanté par Enlil, puis par Marduk, et ce dernier devint le vrai chef des dieux.
/Spawy
Enlil
Frère d'Ea/Enki, qui règne en maître dans les eaux souterraines, et fils d'Anu, roi des dieux qui siège au ciel, Enlil occupe un poste intermédiaire. Au contraire de son père, il est particulièrement soucieux du monde humain, ce qui fait de la Terre son royaume. Adulé des hommes et des femmes, il loge dans la ville de Nippur, qui est aujourd'hui le site de Nuffar en Irak. Il y possède un grand temple appelé "Maison-Montagne", ce qui fait référence à son titre de "Grande Montagne". Comme il détient les Tablettes du Destin depuis que son neveu Marduk les lui a remises, il écrit l'Histoire humaine en choisissant les royaumes qui, pour un temps, doivent être florissants. Il a pour fonction de désigner les rois humains et de délimiter les frontières des territoires, mais il commande également aux dieux mineurs présents sur le sol terrestre, que l'on nomme les Igigi. Ce rôle lui vaut le titre de "Père des dieux" et fait de lui une figure emblématique des textes mythologiques. S'il en est rarement le héros, il est très souvent présent comme chef suprême. L'Hymne à Enlil, qui lui rend hommage, fait de lui le guide sans lequel l'humanité n'aurait pu s'organiser :
"Sans Enlil la Grande Montagne, aucune ville n'aurait été construite, aucun habitat n'aurait été érigé ;
Aucun enclos à bétail n'aurait été construit, aucune bergerie n'aurait été établie ;
Aucun roi n'aurait été élevé, aucun seigneur ne serait né ;
Aucun grand-prêtre ou grande prêtresse n'accomplirait l'extispicine (= la divination) ;
Les soldats n'auraient pas de généraux ou capitaines."
Enlil n'est cependant pas exempt de vices et malgré son statut important parmi les dieux, il fut une fois banni par eux. Un jour, il rencontra la déesse Ninlil, dame du vent et divinité de la fertilité, et s'en éprit follement. Mais la mère de Ninlil, Ninshebargunu, la mit en garde contre Enlil et lui demanda de s'en préserver. La jeune déesse maintint donc de la distance entre eux, mais Enlil ne put s'empêcher de la suivre partout où elle allait. Et tandis qu'il l'épiait en train de se baigner, il ne résista pas à ses pulsions et sortit de sa cachette pour la violer, alors qu'elle était encore vierge. Son crime le rendit impur aux yeux des dieux, qui le condamnèrent aux Enfers. Pendant son exil, Ninlil eut un enfant, qu'elle nomma Nanna (ou Sîn dans la langue akkadienne) et qui devint le dieu de la lune. Elle voulut ensuite rejoindre Enlil, que malgré tout elle aimait, et elle parvint à le trouver. De leurs unions consenties nacquirent deux autres enfants : Ninurta, dieu guerrier, et Nergal, dieu des Enfers. Le temps passa et devant le pardon qu'avait accordé Ninlil à celui qui deviendrait son époux, les dieux accéptèrent de laisser Enlil rentrer chez lui.
Mais les êtres humains, eux aussi, durent parfois faire face à la violence d'Enlil. Son pouvoir était tel que, s'il pouvait rendre florissante une ville, il pouvait également causer la perte d'autres. Il réduisit donc à néant certains royaumes - quand il ne s'en prenait pas à l'humanité toute entière ! En effet, lorsque les êtres humains, tous dôtés de l'immortalité mais ne connaissant aucune limite à leur expansion, commencèrent à surpeupler la Terre, Enlil, furieux contre eux, déclencha le Déluge. Il confia ses plans aux autres dieux et leur fit jurer de ne pas avertir les humains, mais Enki le trahit et prévint Outnapishtim (également appelé Atrahasis) le Sage. Ce dernier construisit un bateau sur lequel il fit monter un mâle et une femelle de chaque espèce animale à sa portée, les soustrayant aux trombes d'eau qui noyaient tous les alentours. Cet épisode, conté dans L'Epopée de Gilgamesh et L'Epopée d'Atrahasis, est bien entendu la source du récit biblique du Déluge.
Quand les dieux réalisèrent l'ampleur qu'avait pris le Déluge, ils pleurèrent la mort des êtres humains et des animaux, et en voulurent à Enlil de les avoir tués. Enlil, encore furieux, voulut s'opposer à eux. Mais son frère Enki parvint à le calmer et lui fit réaliser l'erreur qu'il avait commise. Les dieux, en effet, avaient besoin des hommes et des femmes pour travailler la terre à leur place. Sans eux, les Igigi étaient les esclaves des Annunaki et se voyaient condamnés au labeur, or Enlil, en temps que chef des Igigi, ne pouvait tolérer cela. Enki apporta ensuite une solution au problème de surpopulation : il rendit les êtres humains mortels et s'arrangea pour que certaines femmes soient infertiles et que quelques maladies fassent le ménage de temps à autre. Enlil, pour se faire pardonner et reprendre sa place sur Terre, empêcha la mortalité d'atteindre Outnapishtim/Atrahasis, qui devint le seul être humain immortel, en récompense de ses bonnes actions.
A partir des années 1400 avant Jésus Christ, Enlil se verra supplanté dans le coeur des hommes et des femmes par Marduk, dont le rôle lors de la création du monde sera rappelé et reconsidéré.
/Spawy
Marduk
Suite au meurtre d’Apsû par le jeune dieu Ea (aussi appelé Enki), et à l'installation de celui-ci dans la Maison de l'Abîme, Tiamat cria vengeance. Après avoir pris pour nouvel époux son fils Kingu, Tiamat rassembla onze monstres pour tuer Ea/Enki et son épouse, et confia les Tablettes du Destin à Kingu. Les dieux sentirent qu'une catastrophe arrivait et tinrent un conseil de guerre, au cours duquel chacun déclara n'être pas de taille à affronter Kingu et Tiamat. Parmi eux se trouvait Marduk, la personnification de l'action fécondante de l'eau. Fils d'Ea, il n'était qu'une divinité agraire dont le principal attribut était une sorte de bêche, le marrou. Lorsqu'il se proposa finalement pour mener le combat, les dieux se rirent de lui. Pourtant, il fut le seul à accepter de se battre, et il fallut bien l'y autoriser. Ea, par ailleurs, encourageait vivement son fils à prendre les armes.
Pour être certain de vaincre, Marduk eut une idée. Il réclama aux autres dieux les "pleins pouvoirs", c'est-à-dire qu'il demanda que chacun d'eux lui transfère sa magie. Tout le monde accepta et confia son pouvoir à l'apprenti guerrier. Pour vérifier le succès de l'opération de transfert, les dieux mirent devant Marduk un vêtement en lui ordonnant de le faire disparaître puis reparaître. Marduk réussit l'épreuve sans mal et les dieux lui remirent les insignes du pouvoir.
Marduk partit sur le char des Tempêtes, tiré par des chevaux ailés que l'on trouve parfois qualifiés de dragons crachant le feu. Il emporta comme armes un arc, la foudre, l'ouragan, un filet et les sept vents. Lorsqu'il parvint devant Tiamat et Kingu, Marduk fut épouvanté par les monstres déchaînés par Tiamat. Serpents monstrueux, chiens enragés et hommes-scorpions remplis de venin l'attendaient. Marduk prit son courage à deux mains et lança son filet sur Tiamat avant de lui jeter les vents au visage. Ceux-ci entrèrent dans son corps et la détruisirent de l'intérieur, si bien qu'il ne resta plus à Marduk qu'à lui donner le coup de grâce. L'armée de Tiamat, décontenancée par la perte de son leader, fut en déroute. Marduk captura Kingu et lui subtilisa les Tablettes du Destin, devenant ainsi, pour un temps, le maître de toutes les destinées. Il les confia finalement à Enlil, qui régnait sur la Terre.
En séparant le corps de Tiamat en deux, Marduk créa le ciel et la terre. Des yeux de la défunte il fit couler le Tigre et l'Euphrate, puis il organisa le monde céleste et déclara que son étoile, Jupiter, réglerait la marche des astres. Le sang de Kingu mêlé à de l'argile fut animé par lui, permettant la création de l'homme dans le but de servir les dieux.
Marduk décida alors d'ériger un temple, qui serait la résidence des dieux : c'est l'Esagil céleste. Lorsque la construction en fut terminée, les dieux se réunirent en un grand banquet d'inauguration au cours duquel chaque dieu octroya à Marduk un titre. Cinquante noms, correspondant tous à un attribut divin, furent ainsi donnés à Marduk. Il s'unit ensuite à sa parèdre, c'est-à-dire à la déesse inférieure qui lui était associée, et eut un fils du nom de Nabû, désigné comme le dieu du savoir et de l'écriture. Plus tard, à force d'être admiré, Marduk devint le chef incontesté du panthéon, remplaçant Enlil qui avait lui-même succédé à Anu. Et pour conserver son statut, il s'illustra régulièrement par de hauts faits. Par exemple lorsque Zou, l'oiseau-tempête, vola les Tablettes du Destin, Marduk le retrouva et lui fracassa la tête.
/Spawy
Enki, ou Ea
Ea, selon son nom akkadien, ou Enki, selon son nom sumérien, est l'une des plus grandes divinités de la Mésopotamie antique. Fils d'Anu et de Ki et petit-fils d'Anshar et Kishar, il est le maître des eaux fraîches et courantes, de la sagesse, des arts et des techniques, de la magie, et de l'exorcisme. Dans les récits mythologiques il tient souvent le rôle de conseiller auprès des autres grandes divinités.
Enki est parfois représenté sous la forme avantageuse d'un bouquetin à queue de poisson. Mais il apparaît également gratifié d'un corps humain et d'un visage barbu. Au niveau de ses épaules sont alors dessinés des flots ininterrompus, parcourus par quelques poissons. Difficile dans ce cas de savoir si l'eau est censée jaillir directement de ses épaules ou si elle ne fait que couler par-dessus elles. Les interprétations varient.
Le nom d'Enki signifie "maison de l'eau". En effet, ce dieu réside dans un palais encerclé par les flots d’Apsû, au coeur d'un monde souterrain. Ce monde, situé entre la surface de la Terre et les Enfers, porte le nom d'Abîme. Dans Enuma Elish, le poème de la création de l'univers, la ruse d'Enki lui permet d'abattre lui-même Apsû, l'ancêtre des dieux, et d'en revêtir les attributs. C'est ainsi qu'il prend le contrôle de l'Abîme, avant d'encourager son fils Marduk à vaincre Tiamat, la déesse-mère.
Mais Enki n'est pas que le dieu des eaux souterraines, il est également seigneur de la sagesse, patron des artistes, des artisans et des savants. À maintes reprises il remporte des combats intellectuels, comme lors de la création des êtres humains. Un jour, Enki, endormi dans les profondeurs liquides de l'Apsû, est réveillé par sa mère Ki, qui lui ordonne de créer l'homme. Le dieu, fatigué, lui conseille d'effectuer elle-même cette tâche en façonnant un peu d'argile fertile de l'Apsû et en y ajoutant le sang de Kingu, tué par Marduk. Ki se fait aider pour cela par sa fille, Ninhursag (également appelée Ninmah), qui condamne au passage l'humanité au travail. En effet, au début du monde, c'est une partie des dieux qui est tenue de travailler la terre et de veiller à son irrigation : les Igigi, qui s'opposent aux Annunaki, les dieux majeurs. Mais quitte à créer de nouvelles créatures, Ninmah se dit qu'elle pourrait en profiter pour se débarrasser de ce dur labeur.
Plus tard, alors que les dieux fêtent leur réussite, Enki et Nimmah boivent plus que de raison. Ils se livrent alors à un jeu au cours duquel l'un d'eux doit attribuer une fonction sociale à une créature humaine imaginée par l'autre. La déesse commence et crée trois formes humaines dépourvues d'organes génitaux, mais Enki contourne la difficulté en les nommant au poste de prêtre. Il démontre par là son habilité à se sortir des situations délicates. Puis vient le tour d'Enki de former des créatures humaines, et il en imagine une incapable de s'asseoir, de se tenir debout ou de se nourrir. Furieuse de ne pas réussir à lui trouver une fonction, Ninmah condamne Enki à retourner à jamais dans les profondeurs de l'Apsû. Puis elle prend la créature, qui symbolise un nouveau-né, sur ses genoux.
Quelques années plus tard, Enki est confronté au problème du surpeuplement de la Terre par les humains. Alors qu'Enlil, furieux contre les humains, déclenche le Déluge pour tous les exterminer, Enki vient au secours des hommes et des femmes en les prévenant de l'imminence du désastre et en leur expliquant comment l'éviter. Ensuite, il contribue à ramener Enlil à la raison et trouve la solution en abaissant l'espérance de vie des humains et en les exposant à des calamités limitant leur expansion.
Ea/Enki est donc un dieu ordonnateur, qui réorganise le monde pour le bien des dieux, tout en étant toujours bienveillant envers les hommes. Le mythe des Sept Sages rapporte comment des génies civilisateurs furent envoyés par lui pour apporter le savoir aux humains.
Étant une grande divinité mésopotamienne, Enki dispose de temples et chapelles dans plusieurs grandes villes, mais son lieu de culte majeur est la ville d'Eridu, ville antique de Basse-Mésopotamie qui serait aujourd'hui en Irak. S'y trouve son grand temple, l'É-Abzu, ou en français "la Maison de l'Abîme". C'est Enki lui-même qui construisit ce temple, comme le rapporte le Voyage d'Enki à Nippur :
"En ce temps-là, quand les destins eurent été arrêtés,
Et qu'une année d'opulence, venue du ciel,
Se fut déployée ici-bas comme verdure et gazon,
Sire Enki, roi de l'Apsû,
Enki, le seigneur qui arrête les destins,
Se construisit un palais, d'argent et de lazulite
Argent et lazulite étincelants comme le jour !
[...]
C'est à Eridu, sur le littoral, qu'il érigea ce palais
Dont les briques répercutaient l'écho de mille voix
Et dont les parois de roseaux mugissaient comme des bœufs !"
/Spawy