Le Grand Mechant Loup
Bien le bonjour, chers amis. Aujourd’hui, nous allons explorer votre pire cauchemar !
« -Prof, arrête de prendre une grosse voix, tu ne fais peur à personne.
-Hum-hum. Pardon. »
Bref, aujourd’hui, disais-je, nous allons plonger dans les songes turbulents des européens à travers la figure la plus emblématique du cauchemar : le Grand Méchant Loup.
« -Pourquoi en parler aujourd’hui ? Très bonne question voix imaginaire dans ma tête !
-Mais je n’ai rien dit !
-Silence ! »
En fait, je voulais vous parler de la bête du Gévaudan suite à une petite virée estivale dans le Cantal et notamment à Saugues qui est le village de la bête (et du champignon). Maaaaiiiis… je m'étais fait devancer depuis longtemps par Spawy et, m’en rendant compte, je criai un retentissant : « Oh ! La bougresse ! » et me résignai à parler d’autre chose. Or dans ma liste de créatures à faire, il y avait celle qui nous intéresse aujourd’hui (et qui devait faire suite à cet article sur la bête du Gévaudan que je ne ferai jamais…). Mais #kessékesquequoi le Grand Méchant Loup (qu’on abrègera par la suite par GML) ? Ben je vais vous le dire.
Le GML est la personnification (ou animalisation ? Bref, vous me comprenez) de nos craintes, cauchemars et autres trucs pas très joyeux. Il ressemble à un loup (#sansblague), est anthropomorphe, se tenant sur ses pattes arrières mais il peut quand même courir à quatre pattes. C’est un peu le diable mais en moins épique et en moins biblique. C’est le bouc-émissaire du grouillot de base, du pécore, du gueux, du bouseux qui ne sait pas réfléchir plus loin que le bout de son nez. Il y a une disparition au village ? C’est le Loup. Il y a des cadavres ? C’est le Loup. Il y a des brebis mortes ? C’est le fucking Loup ! De l’autre côté de l’Atlantique, on croit au Croquemitaine, ici c’est le GML.
Bon, ça fait léger pour un article, certes, et vous vous demanderez si je suis sérieux à vous livrer un article qui tient en un paragraphe. La réponse est oui. Car l’intérêt ici n’est encore une fois pas la créature en elle-même. Nous connaissons tous le Grand Méchant Loup puisqu’il est l’adversairissime de tous les gosses. Non, ce qui a de l’intérêt avec le GML, ce sont les répercussions que cette figure imaginaire a pu avoir et a encore sur le monde de la réalité véritable. Comme écrit plus haut, tel ou tel malheur était associé soit au Malin, pour les religieux, soit au GML pour les paysans. Ainsi, la chute démographique des populations de loups (cette fois-ci bien réels) est directement liée à la peur d’un Grand Méchant Loup imaginaire (ils sont quand même cons ces pégus !). Et c’est toujours le cas aujourd’hui, même si le lien est beaucoup plus lointain. Le GML est aussi le grand antagoniste de nombreux contes, notamment ceux des frères Grimm, il remonte même aux fables d’Esope ! Il est aussi très lié à c’autres créatures fantastiques comme le loup garou, la bête du Gévaudan et bien d’autres. Aussi des jeux comme le Loup-Garou de Thiercelieux. Sans compter toutes les adaptations du personnage dans des films ou séries. Oui, même dans Doctor Who il y a le GML !
« -Docteur qui ?
*grand bruit de baffe*
-Aïeuuuh !
-Tu l’auras cherchée celle-là ! »
Bref, vous l’aurez compris, j’aime bien le GML et même si je n’en dis pas grand-chose, il compte beaucoup dans mon imaginaire. Bref, à bientôt pour une autre créature fantastique.
« -Aaah… Ben je suis bien content de n’avoir fait aucune allusion sexuelle dans cet article…
-Comment ça ?
-Dis-moi, tu veux voir mon loup ? »
/Le Prof
La Création du Monde
Commençons donc par le début, si vous le voulez bien. Au début, il y a le chaos primordial, le Noun, une sorte d’océan sans forme dans lequel réside tout le potentiel pour faire un monde. Dans cette bouillasse se trouve une entité créatrice qui pionce comme un loir. À un moment, elle se réveille (sans doute une envie de pisser). Et cet être prend conscience de tout le potentiel qu’il pourrait tirer du chaos. C’est pourquoi il se donne un corps. Il est nommé Atoum par les hommes : c’est le premier dieu. Atoum crée ensuite Chou et Tefount, qui sont respectivement le dieu des airs et des vents et la déesse de la lumière et de la chaleur. Ils sont nécessaires pour mettre en branle les eaux chaotiques du Noun. Chou fait crac-crac-boum-boum avec sa sœur (trop) bien aimée et deux enfants naissent de cette union : Ged, déesse de la Terre, et Nout, dieu du ciel. Atoum complète un peu le tout avec le Soleil, qu’il sort de son propre corps. Ainsi naît Râ (ou Rê, mais je préfère dire Râ).
Après tout ça, Nout donne naissance à plusieurs autres dieux et déesses, qui sont des plus connus : Isis, la déesse de la maternité, Osiris, le dieu de la fertilité et du renouvellement, Seth, le dieu de la destruction, et Nephtys, déesse de la stérilité. Mais très vite, il y a des dissensions entre les dieux (notamment à cause de Seth qui est un gros jaloux et qui fout la merde). De ce fait, Atoum, qui est un peu chagriné, verse des joues sur ses larmes… euh non, il verse plutôt des larmes sur ses joues. Et ces larmes tombent sur le sol. C’est ainsi que nous naissons, nous les hommes, ni bons ni mauvais. Ce sont les actions des dieux qui déteignent ensuite sur notre comportement.
Si les dieux ont une longévité et une force bien supérieures à celles des hommes, ils sont néanmoins mortels. Ils peuvent mourir et le chaos l’a bien compris. En colère contre Atoum qui avait puisé en lui pour créer le monde, le Noun engendre des monstres apocalyptiques afin de détruire la Création. L'un d'entre eux se démarque des autres puisqu’il est tout simplement indestructible : le grand serpent Apophis, personnification du mal. Il fait de Râ son ennemi juré et chaque nuit, quand son vaisseau franchit les limites du monde pour survoler le royaume des morts, Apophis attaque farouchement Râ pour tenter de dévorer le soleil. De ce fait, toutes les nuits a lieu un combat à mort entre le dieu et le monstre. On expliquera les éclipses (partielles ou totales) par des victoires momentanées d’Apophis sur Râ.
Voilà un bien gros article ! Mais bon, il fallait passer par là. Si vous avez peur de vous perdre avec tous ces noms, ne vous inquiétez pas, je ferai un second diagramme avec les noms et les filiations. Aussi, je tiens à vous rappeler que la mythologie égyptienne s’étire sur des milliers d’années et que chaque région ou ville avait sa propre cosmogonie (= genèse) selon le dieu principal qu’elles prenaient. Pour avoir une idée, il y a autant de temps qui sépare les premiers rois d'Egypte de Cléopâtre qu'il y a de temps entre Cléopâtre et nous. De ce fait, même si la religion égyptienne est restée plus ou moins la même durant ces millénaires, il y a quand même eu plusieurs changements :
1) Du fait d'une religion très régionale, les mythes divergent sur certains points, que ce soit sur l'identité du démiurge créateur (certains disent que c'est Atoum, d'autres que c'est Râ, ou encore d'autres dieux) ou bien sur les divinités elles-mêmes (certains associent Atoum et Râ sous le nom d'Atoum-Rê).
2) Du fait des différents pharaons et rois, la place d'une divinité change, ainsi que son rôle.
3) Il peut y avoir jusque 700 dieux dans le panthéon égyptien.
Vous imaginez alors tout l'enfer qu'est cette mythologie, autant à traiter pour moi qu'à digérer pour vous. C'est pourquoi je ne vais parler par la suite que des dieux principaux. Je ne peux que conseiller aux plus curieux d'entre vous d'aller consulter des ouvrages et sites spécialisés si vous voulez en apprendre encore plus. Néanmoins, je suis ouvert aux demandes et si vous désirez que je parle de telle ou telle divinité que je n'aurais pas traitée ou que vous redoutez que je ne traite pas, alors je vous rappelle que l'espace des commentaires est là pour vous !
Sur ce, passez une bonne journée et à très vite pour le prochain cours.
/Le Prof
Isis et Osiris
Frère et sœur, Osiris et Isis sont le premier couple divin à régner. Et ce règne est sous de bons augures. En effet, Osiris est le dieu de la fertilité (au sens agricole) et du renouveau, et Isis est la déesse de la fertilité (au sens de fécondité). Leur règne est marqué de justice, de bienveillance et de générosité, ainsi que par plusieurs inventions telles que la religion et l’agriculture. On représente Isis comme une femme, portant sur sa tête le disque solaire entre des cornes de bœuf (ou un trône, meh), et Osiris comme un homme portant les apparats des rois (coiffe, sceptres, barbe postiche). Il y a quand même un détail qui choque : il a la peau verte.
« -Encore une preuve de la théorie des anciens astronautes et que le gouvernement nous ment !
-Mais que fais-tu encore là ?
-Je dénonce les mensonges d’État et—
-Tais-toi sinon tu vas t’en prendre une ! Je vais le dire pourquoi il est vert ! »
Vous vous en doutez, la direction du pays n’est plus exactement la même et il en va de même pour le monde de la mort. En effet, Osiris laissait chacun passer dans l’autre monde, sans regarder l’âge, le sexe ou la richesse. Avec Seth, il faut raquer mon goret ! Saint Trop’ pour ceux qui ont du flouze et les favelas brésiliens pour les pauvres (service CRS bien vénères compris) ! Et chez les vivants, ce n’est guère mieux. Isis n’aime pas trop beaucoup ça et à l’aide de sa sœur Nephtys, de Thot et d’Anubis, elle va chercher le corps d’Osiris pour le planquer dans un marais ; cadavre découvert peu de temps après par Seth lors d’une petite chasse. Et là, Seth il est colère. Il découpe le corps de son frère en plusieurs morceaux (entre douze et quinze), qu’il disperse un peu partout. De ce fait, la petite troupe se remet en quête des morceaux du puzzle – euh ! d’Osiris – pour pouvoir le reconstituer et lui faire faire un enfant. Comment ? Eh bien en le momifiant et en lui inspirant un léger souffle de vie, pardi ! Voilà pourquoi il a le teint plus proche de la pénicilline que de la peau hâlée des égyptiens. Par contre, comment ils se sont débrouillés pour lui faire engrosser Isis, c’est un mystère, car il manque un morceau d’Osiris qui doit être dans l’estomac d’un crocodile. Et ce morceau… ben… c’est le service trois pièces (ils sont forts ces dieux égyptiens, diablement forts !).
Ainsi naît Horus. Isis devient apparentée au rite funéraire et Osiris, par sa droiture d’âme et sa générosité, devient le roi du royaume des morts et préside aux portes de la mort. Voilà qui termine notre histoire du jour. Mais ne vous inquiétez pas, nous reparlerons de Thot, Seth, Nephtys, etc., dans de prochains articles. A bientôt sur les bords du Nil.
La Huldre
Connaissez-vous la bergère à queue de vache ? Non ? C'est normal, car la Huldre est presque inconnue de nos contrées.
S'il est né de la tradition orale norvégienne, le mythe des Huldres a connu une réécriture chrétienne qui seule aujourd'hui propose une explication à la naissance de ces créatures à l'apparence faussement humaine. Je vais donc vous conter cette version, afin de satisfaire l'usage qui veut que l'on commence une histoire par son début. Tout partit d'une situation banale. Une femme, mère de plusieurs enfants, lavait ces derniers dans son chalet quand Dieu en personne entra dans sa maison (fin de la banalité). Comme elle n'avait pas achevé son ouvrage et que les marmots n'étaient propres que de la tête et du torse, la femme cacha le bas de leurs corps, dont la saleté lui faisait honte. Dieu, voyant cela, décida que plus jamais l'humanité ne devrait avoir à poser les yeux sur la moitié souillée des corps de ces enfants (parce que, c'est tout). Les jeunes garçons s'en tirèrent sans séquelles, mais les filles, elles, virent leurs corps se déformer sous la malédiction : une longue queue de vache leur poussa, et leurs dos se creusèrent jusqu'à former un trou au niveau de leurs colonnes vertébrales. Elles devinrent ainsi les premières Huldres (hulderfolket si nous voulons employer le pluriel correct). Une variante suédoise préfère une queue de renard à une queue de vache, sans doute pour évoquer une certaine perfidie de la créature, mais c'est une version bien moins prisée.
Réfugiées dans la forêt, les Huldres n'eurent plus qu'un seul objectif : épouser un homme. Il s'avéra en effet que le sacrement du mariage était l'unique porte de salut de ces femmes. Au jour de la cérémonie, et à condition que l'union soit consentie et sans violence, leur horrible queue tomberait et leur dos redeviendrait visible (là apparaît tout l'intérêt de la légende pour la religion chrétienne, qui encourage à travers ce biais une vie maritale rangée et sans excès). Sortant de la brume déguisées en bergères, elles abordèrent alors les hommes qui passèrent près de leur cachette, et presque toujours, elles parvinrent à les séduire, grâce à la Huldre Slaat, une chanson envoûtante qu'elles scandèrent. Il faut préciser par ailleurs que la nature les avait particulièrement gâtées, et qu'elles étaient plus belles que n'importe quelle humaine. Cependant, la séduction n'aboutit qu'à peu d'épousailles. Il fut en effet difficile pour la plupart d'entre elles de dissimuler leur appendice caudal sous leur jupe, et les jeunes prétendants furent révulsés à cette vue. Les Huldres devinrent alors les succubes des bois, condamnées à attendre un homme capable de supporter leur difformité. Elles établirent des rituels, et suivant le statut du garçon qui passait près d'elles, elles adaptèrent leur attitude. Si l'individu était marié, elles apparaissaient nues, tentatrices, en véritables démones. Mais s'il était célibataire, leur objectif reprenait le dessus, et elles se présentaient en bergères timides et jolies.
Commençait alors une période complexe de séduction. Si l'homme était assez amoureux pour supporter la queue de vache et la difformité du dos, la Huldre le mettait à l'épreuve. Il devait, pendant une longue période, pouvant aller jusqu'à plusieurs années, taire le mariage à venir et rester à distance de sa promise, sans l'oublier. S'il était capable de passer des mois, ou des années, sans voir la Huldre et sans la tromper, alors ses sentiments étaient jugés assez purs pour mériter qu'elle se donne à lui. Bien entendu, cela arriva peu... Et pourtant, cela valait le coup. Car les Huldres qui parvinrent à trouver leur prince se révélèrent d'excellentes épouses, créatrices d'un profond et pur bonheur. Il ne s'agit donc pas de créatures malfaisantes, même si certaines de leurs actions peuvent être mauvaises.
Des coutumes aujourd'hui disparues naquirent de ce mythe. Avant de faire bâtir une maison, ses futurs occupants devaient passer une nuit entière sur le terrain qui la verrait sortir de terre, avec tous les outils. S'ils faisaient de mauvais rêves à cette occasion, ils en déduisaient qu'une Huldre vivait non loin et qu'elle tenterait de s'en prendre à leur mariage. Ils changeaient alors leurs projets.
J'espère que cela vous a plu, et que vous saurez quoi faire si un jour votre petite amie révèle une longue queue de vache.
/Spawy
Seth et Nephtys
Bien le bonjour, mes petits égyptologues. Aujourd’hui, nous allons parler du couple Seth-Nephtys. Si vous avez suivi les articles précédents, vous devez deviner que ce couple est l’exact opposé de celui proposé par Isis et Osiris.
Au départ, leur mariage semble heureux et Nephtys est réellement amoureuse de son frère - en passant, Nephtys ressemble à une femme munie d'ailes d’or et de bleu et est donner un enfant à Seth. De plus, Seth est extrêmement jaloux. En ajoutant à cela qu’il règne sur un désert inhospitalier, qu’on ne lui rend pas grâce comme à Osiris et qu’il ne ressemble à rien (oui, sa tronche n’est pas celle d’un animal), on comprend un peu mieux pourquoi il a occis son frère. Mais cependant qu’il règne à la place d’Osiris et instaure l’impôt pour passer dans le monde d’après, Nephtys, qui apprécie et est encore appréciée des autres dieux, s’en va aider Isis et Thot à retrouver les morceaux d’Osiris.
Ce va être un petit article car les histoires de chaque divinité sont tellement liées aux autres que vouloir être exhaustif est impossible (sauf si je faisais un article unique de 40 pages). Aussi, plutôt que de nous répéter, nous allons parler un peu d’Horus. Le fils d’Osiris (et la troupe qui l’accompagne) est donc en conflit avec Seth pour le trône d’Égypte. Après quelques batailles où Horus n’arrive pas à vaincre, les autres dieux sont convoqués pour régler cette affaire avec un procès. Peu sont du côté d’Horus, qui n’est pas reconnu comme fils légitime d’Osiris. C’est notamment le cas de Râ, qui préside l’assemblée.
Durant ce procès, qui dure plusieurs décennies, le comportement de Seth devient de plus en plus tyrannique et Râ commence à se dire que finalement, ce serait peut-être mieux de placer Horus, qui l'adore et semble vivre justement, sur le trône. Aussi, pour clore le procès, on propose un dernier duel entre les deux. Horus gagne, Seth râle auprès de Râ, et Râ généralement représentée avec un trône ou le disque solaire ceint de cornes de bœuf sur la tête. Mais le fait est que Nephtys est la déesse de la stérilité et est donc incapable de l’envoie se faire foutre. Le dossier est clos, et Seth monte finalement sur la barque de Râ pour l’aider à poutrer Apophis, comme Râ l’avait prévu au début.
Voilà, je vous dis à la prochaine.
/Le Prof
Horus
Si Horus est l’un des dieux les plus suivis dans l’Egypte antique, c’est parce qu’il est à la base d’une des plus anciennes lignées de consanguins du monde : la monarchie pharaonique. Comme tout pharaon, il représente l’ordre et est garant de l’harmonie cosmique.
Il n’y a rien de plus à dire sur Horus si ce n’est rappeler sa victoire contre Seth. Comme on l’a dit, un tribunal est convoqué pour juger la querelle entre eux, le procès semble interminable et dure environ 80 ans. Saoulés de tout ce bazar, les juges proposent aux contestataires une série d’épreuves. Les deux dieux acceptent et finalement, Horus en ressort vainqueur.
Voili-voilou pour Horus. Je vous laisse pour l’heure, à bientôt.
Le Feu Follet
Fais pas le con, la casse pas, y'a un feu follet dedans. Si tu sais, un feu follet. Non c'est pas vide, il dort c'est tout. Tu sais pas ce que c'est? Je te le dis à toi et à tes clients si tu me sers une pinte à l'œil.
Bon, bonsoir à tous, regardez bien ceci. Là, il est éteint, mais à l'intérieur de cette jarre, il y a un feu follet, un vrai de vrai. On dit des tas de choses sur ces créatures surnaturelles, et la plupart sont vraies.
Ils ressemblent à des gerbes de flammes bleutées ou jaunes, parfois vertes, et persistent quelques secondes, ou quelques minutes pour les plus rares. Ils lévitent, proches du sol, mais étrangement, n'enflamment rien, et ne produisent aucune fumée. Il faut dire que la grande majorité apparait au dessus des lacs et étangs.
En fait un grand folklore s'est construit autour de ces apparitions fantômatiques. Il s'agirait en occident, d'âmes coincées dans le purgatoire, qui finiraient peut-être par en sortir à force de prières. En Albion, plus au nord donc, on les appelaient des Jack-o'-Lanterns, des petits garçons fantomatiques, portant des lanternes. Enfin, tous ont la particularité de perdre les voyageurs, quel que soit l'endroit du globe où l'on observe le phénomène. Mais en orient, comme en occident, au nord comme au sud, on ne peut observer ce phénomène qu'à quelque centimètres du sol (ou de l'eau donc) et il n'apparait que dans les marais, les cimetières, et les forêts vieillissantes.
La légende raconte, que pour les semer, il suffirait de planter une aiguille dans le sol. Le feu follet poursuivant, se sentirait alors forcé de passer par son chas, vous donnant largement le temps de vous enfuir. Dans l'eau, une pierre lourde fera l'affaire si vous la jetez suffisamment proche de leur... "corps".
Et c'est là que le fantastique se frotte à la réalité, puisque ces gerbes de flammes sont effectivement... Des flammes. Du feu, j'entend. Il s'agit en fait d'un gaz ( du méthane sans doute), produit par la décomposition des organismes sous terre, qui remonte à la surface et s'enflamme spontanément. Ce qui explique sa présence principalement dans les cimetières et les marécages.
Bonne question, si je l'ai capturé, malgré mon scepticisme, c'est parce que parfois, les explications scientifiques manquent de... panache, et j'éprouve un profond plaisir à tourner les mythes en ridicule. Hein, comment? Ben j'ai planté une aiguille dans le sol, et j'ai mis le flacon devant, quelle question.
Bon, je vous laisse, je vais me coucher. Votre serviteur, ou presque, vous salue bien bas.
/Un vagabond Immobile
Toth
Bien le bonjour, vous qui avez soif de connaissance. Aujourd’hui, tâchons de parler bien car le dieu qui nous intéresse est celui qui a sous sa coupe la protection des scribes. Aujourd’hui, donc, causons un peu de Toth.
Toth est donc le dieu des scribes. Mais pas seulement. Il est le dieu du savoir, de toutes les sciences, des arts, des guérisseurs, des magiciens et bien sûr de la lune, comme dit dans un article précédent. Du fait qu’il régisse les cycles de l’astre lunaire, d’aucuns lui prêtent le pouvoir de commander au temps. En des mots plus vulgaires, Toth gère grave.
Il a un savoir illimité (ce pourquoi il est représenté comme un homme à tête d'ibis*) et est en charge de le transmettre. C’est lui qui, pour permettre cette transmission, invente le langage et l’écriture. Il connaît tout sur tout et sait des formules magiques auxquelles les dieux eux-mêmes ne résistent pas. Ainsi, il est dit que celui qui déchiffrera le Livre de Toth surpassera les dieux. Son savoir lui vaut d’être respecté par les autres divinités, néanmoins, il est conscient de sa supériorité intellectuelle et a tendance à être quelque peu présomptueux, pompeux, ennuyeux à cause de son goût pour les formulations alambiquées, les tons empruntés et les discours soignés et précis. Malgré le respect que chacun a pour lui, Toth se prend quelques remarques sur cet aspect agaçant de sa personnalité.
Un problème d’interprétation et de différence de culte perturbe le récit de ses origines. En effet, dans le mythe osirien sur lequel se base mon article sur Horus, Toth est censé naître d’un combat entre Seth et Horus. Or selon d'autres versions, Toth devrait exister depuis plus longtemps. Aussi ne revenons pas sur ce sujet, l’important c’est qu’il soit celui qui soigne l’œil gauche d’Horus.
Une autre de ses attributions est d’être le scribe des dieux et notamment le greffier d’Osiris lors des procès des morts. Si Anubis s’occupe des manipulations et qu’Osiris préside et prend la décision finale lors de la pesée de l’âme, Toth est celui qui vérifie et note tout. Il est généralement présenté comme un dieu secondaire, de moindre importance. Mais il n’a absolument pas de quoi rougir face à Râ. Je dirai même qu’il est plutôt l’autre face de la pièce sur laquelle se trouve le dieu solaire. Bref, Toth envoie du boudin !
Voici qui est tout pour moi, je rends l’antenne. A bientôt et n’oubliez pas, Toth SAIT ce que vous faites le soir sous votre couette !
/Le Prof
*L'ibis est connu pour savoir distinguer l'eau potable de l'eau non-potable. Ainsi, il est l'oiseau qui sait et c'est donc naturellement qu'on représente le dieu qui sait tout par l'ibis.
Les Roussalki
Jeunes filles maudites par leurs parents, suicidées ou noyées, jeunes filles égarées dans la forêt ou mortes pendant la semaine de la Trinité, enfants volés par le diable, enfants morts avant le baptême... Les femmes mineures ayant connu une fin tragique risquent, selon la légende russe, de se changer en Roussalki, des créatures aquatiques aux intentions fort mauvaises. Les Roussalki, pluriel de Roussalka, sont des beautés dangereuses peuplant les eaux douces des rivières, lacs et étangs. Appelés Wilis dans le folklore serbe, elles s'apparentent aux naïades grecques.
Lorsqu'elles sont encore jeunes, leur beauté est saisissante et leur légèreté telle qu'elles peuvent bondir de branche en branche au-dessus de leur point d'eau. Leurs cheveux sont longs et épais, pouvant être roux ou verts (parce qu'il est bien connu que les cheveux roux relèvent du mythe), elles portent une couronne de fleurs pour seul vêtement, et leurs voix suaves ensorcèlent les hommes. Si elles se replient au fond de l'eau pendant l'hiver, elles sont particulièrement actives la semaine précédant la Trinité. Elles se répandent alors dans les roseaux et les champs environnants et entreprennent leur œuvre de séduction. Quand elles attirent le regard d'un pauvre hère, elles s'approchent de lui jusqu'à pouvoir poser leurs mains sur son torse. Alors, elles le tuent d'une manière particulièrement originale : elles le chatouillent à mort. La même douleur attend l'imprudent qui s'aventure dans l'eau pendant cette période, quand il ne se noie pas avant. Quant aux filles qui se feraient attraper et tuer, leur sort vous est déjà connu. Il est néanmoins possible qu'une Roussalka s'éprenne de l'une de ses futures victimes, et qu'elle l'emmène au fond de l'eau pour en faire son amant, en veillant à ce que ses poumons ne se remplissent pas de liquide. Elle le laissera ensuite ressortir, et il gardera éternellement la nostalgie de ce moment de volupté. A moins qu'il ne parvienne à glisser autour du cou de la Roussalka une croix chrétienne, auquel cas elle perdra ses pouvoirs et pourra être épousée. Mais ces unions ne sont jamais très heureuses.
Une fois âgées, les Roussalki perdent leur beauté et deviennent repoussantes. Elles emploient alors des méthodes moins subtiles pour attraper les passants et les achever. Elles s'éloignent de la communauté et préfèrent vivre seules, dans un petit coin de rivière désertique. Elles visitent régulièrement leur propre tombe et, si elles découvrent que celle-ci est mal entretenue, elles peuvent punir de mort leurs parents irrespectueux.
/Spawy
Jack Talons-à-Ressort
Bonsoir tout le monde ! Aujourd'hui, penchons-nous sur un élément anglais de la série des méchants Jack (Jackalope, Jacques a dit, Jack l'éventreur...) au nom pour le moins saisissant : Jack Talons-à-ressort. Spring-Heeled Jack apparut pour la première fois en 1837 près d'un cimetière londonien. S'il n'y eut aucune attaque à déplorer, il fut aperçu par un homme alors qu'il sautait d'un bond leste les hauts murs encerclant le lieu, et une première description de lui se mit à circuler. On parla de traits démoniaques, d'un nez et d'oreilles larges et pointus, d'yeux rouges, associés à une curieuse faculté de se projeter dans les airs pour franchir les obstacles. Un lien fut fait entre cette étrange vision et un phénomène récent : l'apparition, dans le ciel, d'une gigantesque boule de feu, qui aurait peut-être pu amener la créature sur Terre. Puis au mois d'octobre, plusieurs accidents de voiture furent attribués à un homme bondissant sur la route pour effrayer les conducteurs avec son visage cauchemardesque, avant de s'enfuir en sautant aussi haut que loin. Cette caractéristique valut au rôdeur son surnom de Talons-à-ressort.
Le 9 janvier 1838, une plainte fut déposée contre lui, l'accusant d'encore une demi-douzaine de farces. Elle fut immédiatement suivie d'une centaine d'autres, et il apparut que les méfaits de la créature étaient connus dans toute la campagne environnant Londres. On rapportait des attaques de voiture, mais également des agressions de femmes. Sans jamais être mortelles, elles effrayaient suffisamment les pauvres victimes pour qu'elles perdent la raison et ne s'en relèvent pas (parce qu'il est bien connu que les femmes sont plus instables et fragiles que les hommes...). La police fut mise sur le coup et prétendit régler l'affaire en quelques semaines. De fortes récompenses furent promises. Mais bien évidemment, personne ne put mettre la main sur Jack Talons-à-ressort, ce qui amusa beaucoup ce dernier.
La nuit du 19 février, il toqua au hasard à la porte d'une maison en criant que Jack Talons-à-ressort, lui-même donc, avait été capturé. Il réclama une bougie pour examiner son soi-disant captif, et Jane Alsop, une adolescente, courut ouvrir, persuadée d'avoir affaire à un policier. L'homme avait entre temps reculé de quelques mètres, et elle s'avança hors de la maison pour lui porter de la lumière. Elle ne distinguait dans l'obscurité qu'une longue cape, recouvrant le corps de l'individu. Mais à l'instant où elle l'atteignit, Jack Talons-à-ressort jeta le tissu et découvrit son visage immonde. Ses yeux brillaient d'une forte lumière rouge et sa bouche cracha des flammes bleues. Ses vêtements moulants luisaient comme s'ils étaient recouverts d'huile. Sans dire un mot, il se saisit de la jeune fille et déchiqueta ses vêtements avec ses mains griffues, acérées, et froides comme la glace. Jane Alsop hurla et parvint à se dégager avant de courir vers la porte de sa maison. Jack Talons-à-ressort la rattrapa en enfonçant ses serres dans son cou et son crâne, arrachant une partie de ses cheveux, puis fit demi-tour sans l'achever, la laissant gravement blessée.
Huit jours plus tard, Lucy Scales (retenez-bien : si vous voulez entrer dans l'histoire sans trop vous fouler, faites-vous agresser par un démon ! On retiendra votre nom et vous deviendrez une petite célébrité), croisa un homme vêtu d'une cape sur le bord de la route. A l'instant où elle arriva à sa hauteur, celui-ci lui cracha une grande quantité de flammes bleues au visage, l'aveuglant momentanément. Elle en fut tant choquée qu'elle s'écroula sur le sol et fut saisie de spasmes violents qui durent plusieurs heures (épilepsie ? grande sensibilité féminine ? ou pouvoir particulier du démon ?).
Dans le mois qui suivit, un homme, dénommé Thomas Millbank, affirma être Jack Talons-à-ressort (autre technique pour devenir célèbre, si vous n'avez pas trop peur de la prison). Il fut finalement arrêté après que la police ait trouvé dans son jardin une longue cape et des vêtements moulants, mais il échappa à la condamnation... En effet, son récit des attaques occultait totalement les flammes bleues, et il s'embrouilla en tentant d'expliquer comment il avait pu sauter d'un bond des murs de trois mètres de hauteur et déchiqueter les habits de ses victimes. Il sembla que l'appât de la célébrité avait été plus déterminant que la vérité dans ces aveux.
Le véritable Jack Talons-à-ressort ne fut jamais arrêté et perpétua ses crimes au-delà de la longueur d'une vie humaine, ce qui lui permit de demeurer dans la catégorie des démons, voire, suivant certaines thèses s'appuyant sur l'épisode de la boule de feu, des extraterrestres. Il s'en prit par exemple à un régiment de soldats en 1877, et il fut découvert que les balles ne le blessaient pas, déclenchant uniquement sa fureur. Puis quand en 1939 il fut retrouvé à Prague, il reçut le surnom de Péràk, ou Homme-Sauteur de Prague. Il se promena encore en Europe, essentiellement de l'Est, avant de revenir vers l'Albion.
Ma première remarque sur la série des Jack n'était pas totalement absurde, car il se pourrait que notre ami bondissant ait inspiré la légende de Jack l'éventreur, voire ait été la cause des actes de ce célèbre meurtrier. C'est une théorie qui se retrouve de temps à autre.
J'espère que mon histoire vous a plu, et je vous dis à bientôt.
/Spawy